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LETTRE DE TOKYO

Une vague de « terrorisme culinaire » submerge le Japon depuis le début de la pandémie de Covid-19. Sévissant au cœur de la nuit dans les foyers, le meshi tero fait ses victimes parmi les salariés contraints au télétravail et les personnes interdites de sorties nocturnes par les appels du gouvernement à restreindre ses activités sociales.

Les auteurs de ces « attentats », dans un pays abritant le plus grand nombre de restaurants étoilés du Michelin et une foule (140 000 pour la seule région de Tokyo) d’estaminets servant des sushis, des ramen ou encore du riz au curry, se dissimulent dans les studios de télévision.

Armés de caméras et de scénarios léchés, souvent inspirés de mangas ou de romans, ils enchaînent les séries sur le thème des plaisirs gustatifs, diffusées tard dans la soirée et dont le succès titille les palais. « Ces images sont un danger gastronomique qui vous force à vous lever et courir dans la cuisine ou à la supérette du coin pour acheter à manger », constate J : Com Magazine, spécialisé dans les programmes télévisés. D’où ce qualificatif de meshi tero.

« La Route des plats disparus »

Zetsu meshi rodo (« La Route des plats disparus ») en est le plus récent succès. Dans ce feuilleton, un salarié un peu gauche d’une quarantaine d’années profite des absences de sa femme et de sa fille – assidues des concerts d’un groupe de la J-pop – pour s’évader en voiture, aller dormir sur un parking proche d’un paysage connu, comme le mont Fuji, avant de déjeuner dans de bonnes petites brasseries populaires, difficiles à trouver et ayant comme point commun d’être menacées de disparition faute de repreneur.

Le succès de cette série tient aux lieux présentés, au personnage principal – antihéros des plus ordinaire – et au thème de la succession des petites entreprises dans un pays vieillissant.

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La nourriture, comme le rituel du repas, ont toujours occupé une place importante à la télévision japonaise. Sur le fond, observe Tofugu, site spécialisé de culture nippone, « les séries japonaises traduisent une obsession pour la qualité de la nourriture ». Dans leur forme, elles se déclinent selon de multiples concepts.

Les homu dorama, équivalent local des sitcoms, incluaient dans les années 1960 et 1970 une scène de repas en famille, reflétant la réalité des foyers à plusieurs générations. Les années 1980, et notamment celles de la bulle, ont vu la multiplication des émissions de présentation de restaurants. Puis ont suivi des séries où les héros cherchaient à réaliser le rêve de réussir dans la cuisine. Hunguri (2012) parlait d’un jeune aspirant à devenir chef d’un restaurant français. Ando Natsu (2008) évoquait une femme souhaitant réussir dans la pâtisserie.

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Source : Le Monde.fr

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