Le nouveau premier ministre japonais, Yoshihide Suga, le 16 septembre à Tokyo.

Le nouveau premier ministre japonais, Yoshihide Suga, n’aime pas les voix critiques. Il vient de refuser d’entériner la nomination au Conseil scientifique du pays de six professeurs recommandés par cette institution. C’est la première fois qu’un chef du gouvernement refuse de tenir compte des recommandations du Conseil pour le renouvellement de ses membres.

Sans la moindre explication des raisons du rejet de ces personnalités connues dans le domaine de la recherche en science politique, droit, histoire et religion, cette décision tient plus du fait du prince que du respect du processus garantissant l’indépendance de cette institution représentant 840 000 chercheurs de toutes les disciplines chargée de conseiller le gouvernement sur des questions académiques et de renforcer les liens avec des organisations internationales similaires.

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Le veto du premier ministre a soulevé un tollé. Selon le quotidien Mainichi, le veto de M. Suga constitue une « intervention politique qui peut menacer la liberté de la recherche académique ». Une pétition circule appelant le premier ministre à respecter les recommandations du Conseil scientifique, et son président, Takaaki Kajita, prix Nobel de physique en 2015, a remis en mains propres au premier ministre une lettre lui demandant de revenir sur sa décision et, au moins, d’en donner les raisons. Selon le porte-parole du gouvernement, Katsunobu Kato, « M. Suga a agi dans le respect de la loi et il n’a pas à justifier un choix ». Il a ajouté que « le premier ministre n’entend[ait] pas revenir sur cette décision ».

« Organisme indépendant »

Masanaori Okada, professeur de droit administratif à l’université Waseda, fait valoir dans le quotidien Asahi que le Conseil scientifique est « un organisme indépendant et qu’il est inacceptable que le premier ministre décide de ceux qui méritent ou non d’en être membres ». Pour M. Kajita, « le Conseil prend ses décisions en fonction des travaux des chercheurs. Ce principe ne doit pas être mis en cause ». Au cours d’un point de presse, lundi 6 octobre, M. Suga a affirmé que sa décision « n’avait rien de politique ».

Bien que placé juridiquement sous la tutelle du premier ministre, le Conseil soumet pour la forme la nomination des membres au chef de l’exécutif qui jusqu’à présent entérinait ses choix. C’était du moins ce qu’avait déclaré en 1983 le premier ministre de l’époque, Yasuhiro Nakasone. Le premier ministre Shinzo Abe, prédécesseur de M. Suga, entendait changer le mode de désignation des membres du Conseil, mais il n’avait pas mis à exécution cette mainmise de fait de l’exécutif sur une institution garante de la liberté de la recherche académique.

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Source : Le Monde.fr

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