Sur le pont d’observation de l’aéroport de Haneda, à Tokyo (Japon), le 28 février 2023. Sur le pont d’observation de l’aéroport de Haneda, à Tokyo (Japon), le 28 février 2023.

« C’est un ami qui m’a conseillé de venir. » Aujourd’hui en Australie, Yuki Mizuno ne regrette pas son départ du Japon, au début de 2022. Employé dans un restaurant de Sydney, il touche près de 400 000 yens (2 772 euros) par mois. « Pour un job similaire au Japon, je serais à 190 000 yens. Là, je peux économiser. La vie est plus agréable. Je travaille quatre jours par semaine. »

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A 25 ans, M. Mizuno a fait le pari d’horizons plus rémunérateurs et d’un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Comme pour beaucoup de Japonais, le futur se dessine loin d’un Archipel enchaîné à des habitudes datées, comme celle de ne pas prendre ses congés payés pour ne pas perturber un service ou de ne pas quitter le bureau avant son supérieur.

Europe, Etats-Unis, Australie mais aussi Asie du Sud-Est – la Thaïlande est prisée – deviennent des destinations privilégiées. Comme M. Mizuno, Hidemi Fujita s’est installée à Sydney, où elle exerce comme aide-soignante et a vu ses revenus multipliés par deux, à 800 000 yens par mois. « Les Japonais sont appréciés pour leur politesse et leur sérieux », explique la femme de 28 ans, qui rêve de créer sa propre agence de soins à domicile.

« Salaire, environnement de travail, diversité sociale, tolérance »

Certes, les statistiques ne témoignent pas d’une vague de départs massifs de l’Archipel. Le nombre total de Japonais vivant à l’étranger, 1,3 million, a reculé de 2,7 % au 1er octobre 2022, en raison de la pandémie de Covid-19, selon le ministère japonais de la justice.

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Plusieurs indices témoignent pourtant d’un intérêt grandissant pour l’expatriation, phénomène largement relayé par la presse nippone. Les demandes d’informations pour des postes hors du pays ont été 1,5 fois plus nombreuses en 2022 qu’en 2021, expliquait, début mars, dans le quotidien Nihon keizai shinbun, Satsuki Tamura, fondatrice de GJJ, une société d’aide au changement de carrière à l’étranger. Auparavant, la plupart des demandeurs étaient âgés de moins de 40 ans, diplômés d’universités prestigieuses. Aujourd’hui, les sollicitations émanent aussi de quinquagénaires et de sexagénaires.

« De plus en plus de personnes trouvent l’Amérique du Nord et l’Europe occidentale plus attrayantes que le Japon en matière de salaire, d’environnement du travail, de diversité sociale et de tolérance », confirme Tsukasa Sasai, professeur à l’université préfectorale de Fukui, spécialisé dans les questions démographiques.

Sentiment de déclassement

La première raison de l’expatriation est pécuniaire : les salaires stagnent au Japon depuis les années 1990, en raison du développement accéléré des emplois précaires, après l’éclatement de la bulle spéculative de la fin des années 1980. La forte dépréciation du yen en 2022 par rapport à l’euro ou au dollar n’a fait qu’aggraver un certain sentiment de déclassement dans la troisième économie du monde, où les revenus ramenés en dollars sont désormais inférieurs à ceux de la Corée du Sud, de l’Italie et de la France.

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Source : Le Monde.fr

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