A force de construire des cabanes pour les autres, les architectes finissent parfois par éprouver l’envie, voire le besoin, d’en construire une pour eux-mêmes. C’est l’histoire de la « Maison de thé trop haute » (Takasugi-an) imaginée en 2004 par l’architecte japonais Terunobu Fujimori.
« Je venais de construire les maisons de thé Ichiya-tei et Ku-an, mais au moment de les livrer à leurs propriétaires, j’ai senti quelque chose d’inattendu et d’inédit se produire en moi, comme si une voix intérieure disait : “Je ne veux pas vous les donner” (…) Je sentais que si je n’étais pas capable d’en créer une pour moi-même, je ne pourrais jamais plus en faire pour quelqu’un d’autre », se souvient Fujimori dans Treehouses, Towers and Tea Rooms : The Architecture of Terunobu Fujimori, de Mauro Pierconti (2019, éditions Electa, 260 pages).
Sur deux troncs de châtaigniers
Codifiées depuis le XVIe siècle, ces petites constructions pour la cérémonie du thé occupent une place particulière dans l’architecture nippone. Une longue tradition que connaît bien l’historien de l’architecture qu’est aussi Terunobu Fujimori. Celui-ci dessine sa propre déclinaison à Chino, ville où il est né et qui se situe dans la région montagneuse de Nagano. Perchée à plus de 6 mètres de haut, sa maisonnette faite de matériaux naturels repose uniquement sur deux troncs de châtaigniers.
Cette cabane fragile, que le vent chahute parfois, a des airs de nid d’oiseau et semble sortie d’un film d’animation d’Hayao Miyazaki ou d’un conte pour enfants. Cet espace de 6 mètres carrés de surface est « si haut qu’il faut monter deux échelles pour accéder à la partie qui se trouve en dessous, ouvrir une trappe, puis enfin entrer dans ce petit et confortable espace », explique l’historien en architecture Mauro Pierconti.
Là-haut, la vue à travers les ouvertures qui éclairent l’habitacle est vertigineuse, avec la vallée verdoyante en contrebas. Cette construction folle et audacieuse imaginée par Fujimori vient rompre le modèle historique des maisons de thé, alcôves traditionnellement sombres et isolées du monde extérieur. Tournée vers la nature, sa cabane dans les airs se veut une invitation au voyage spirituel.
Visites possibles d’avril à novembre grâce à l’agence de tourisme locale Chino Tabi.
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Source : Le Monde.fr
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