Au Japon, un ancien militaire nommé à la tête du controversé sanctuaire Yasukuni, symbole de l’impérialisme nippon

L’entrée en fonctions, lundi 1er avril, de l’amiral et ambassadeur à la retraite Umio Otsuka à la tête du sanctuaire Yasukuni traduit une volonté de « renationalisation » d’un site qui symbolise le militarisme nippon des années 1930 et 1940. Dans l’édifice sont honorées les âmes déifiées de 2,5 millions de soldats morts pendant les guerres menées par le Japon, mais aussi de quatorze criminels de guerre de classe A. Les visites qu’y effectuent les premiers ministres, la dernière, en 2013, par l’ex-chef du gouvernement, Shinzo Abe (1954-2022), et les parlementaires japonais suscitent régulièrement des tensions avec les deux Corées et la Chine, qui ont toutes subi l’impérialisme nippon.

M. Otsuka succède au prêtre Takeshi Yamaguchi, en fin de mandat, à la fonction de supérieur de ce sanctuaire du culte shintoïste, installé au cœur de Tokyo. « Après quarante-trois ans de travail au service de la paix dans le monde, je suis fier de pouvoir, dans ma nouvelle vie, servir dans ce “sanctuaire de la paix”, où sont consacrés les esprits de ceux qui ont donné leur précieuse vie pour leur pays », a déclaré M. Otsuka.

Né en 1960 à Tokyo, l’ancien militaire est entré dans les Forces maritimes japonaises d’autodéfense (la marine des FJA, l’armée nippone) en 1983. Il a dirigé l’école des officiers supérieurs de la marine puis les services de renseignement du ministère de la défense. Retraité en 2019, M. Otsuka a été, jusqu’en novembre 2023, ambassadeur à Djibouti, où les FJA disposent d’une base. Son épouse est l’ambassadrice Yoshie Nakatani, actuellement à la tête du bureau de Tokyo de l’Organisation de coopération et de développement économique.

« Pays apaisé »

Umio Otsuka peut donc se prévaloir d’une carrière au service de l’armée puis de la diplomatie du Japon, qui donne une dimension politique à sa sélection par les dirigeants de Yasukuni. Dans le bulletin de février du sanctuaire, M. Otsuka explique avoir visité Yasukuni à de nombreuses reprises, guidant des délégations de diplomates et de militaires étrangers.

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Initialement nommé « Tokyo Shokonsha », Yasukuni (« pays apaisé ») a été construit, en 1869, en hommage aux soldats morts pendant la guerre de Boshin (1868-1869), qui avait mis fin au shogunat de l’ère d’Edo (1603-1868). Jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale, le sanctuaire se trouvait sous la juridiction des ministères de l’armée et de la marine.

Le poste de supérieur revenait traditionnellement à des personnalités issues de la noblesse. « Ce sanctuaire faisait des soldats morts pour l’Empire des divinités héroïques ayant sacrifié leur vie au nom de la paix du Japon », rappelle Koichi Nakano, de l’université Sophia, à Tokyo.

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Source : Le Monde.fr

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