Chronique. La catastrophe de Fukushima en mars 2011 constitue une expérience unique, par sa durée et son amplitude, pour analyser les modalités et les effets de mesures de sobriété énergétique dans un contexte de choc affectant la production d’électricité : l’arrêt de toutes les centrales nucléaires japonaises (à une exception près) a privé l’Archipel de 30 % de sa production d’électricité.

Il a certes fallu trouver d’autres sources d’énergie, mais aussi et surtout réduire la consommation (« Responding to electricity shortfalls : electricity-saving activities of households and firms in Japan after Fukushima », Osamu Kimura et Ken-Ichiro Nishio, Economics of Energy & Environmental Policy n° 5/1, 2016). Les mesures d’économies d’énergie ont permis une réduction de la demande d’électricité de plus de 15 % dans les régions de Tokyo et d’Osaka pendant près de quatre ans, grâce aux efforts conjoints de tous les acteurs.

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Outre l’analyse de l’évolution de la consommation d’électricité, les deux économistes ont mené plusieurs enquêtes détaillées auprès des ménages et des entreprises. Le gouvernement a en effet imposé une diminution de consommation aux grandes entreprises industrielles, et adressé des recommandations à la population.

Mieux comprendre les motivations des différents utilisateurs

La politique gouvernementale a été guidée par un comité dédié, chargé de l’évaluation permanente du déséquilibre entre l’offre et la demande d’électricité. Au total, ce sont les grandes entreprises qui ont le plus contribué aux économies d’énergie, avec une baisse de plus de 25 % en 2011 puis de plus de 15 % jusqu’en 2014. La mise en place de solutions internes aux entreprises pour produire de l’électricité et le décalage des horaires d’activité pendant des périodes creuses ont joué un rôle majeur, mais elles n’ont pas été durables car elles causaient des difficultés opérationnelles.

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De façon plus anecdotique mais non négligeable, le gouvernement a mis en place la campagne « Cool Biz », incitant les salariés à porter des vêtements moins formels au bureau et… à diminuer ainsi l’usage de l’air conditionné ! Les enseignes commerciales, elles, ont réduit de façon durable l’intensité lumineuse dans leurs rayons et leurs vitrines, identifiée comme excessive. Du côté des ménages, la consommation électrique liée à l’air conditionné a diminué de plus de 40 % en 2011, au plus fort de la crisel’enjeu était alors moins le chauffage que l’été, très chaud et humide au Japon.

Cette étude permet aussi de mieux comprendre les motivations des différents utilisateurs. Pour les entreprises comme pour les ménages, dans un contexte de crise et de régulation des prix, les motivations ont été, dans un premier temps, essentiellement civiques. Dans un second temps, quand le prix de l’électricité a commencé à augmenter (jusqu’à 30 % en 2014 par rapport à 2010), les raisons économiques sont devenues de plus en plus importantes.

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Source : Le Monde.fr

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