Tokyo a retiré la Corée du Sud de la liste des 27 pays bénéficiant d’un contrôle allégé sur leurs exportations. L’approvisionnement en circuits électroniques pourrait être perturbé, et leurs prix augmenter.
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Rien ne va plus entre Tokyo et Séoul, dont les différends sur les questions historiques pourraient finir par peser sur l’économie mondiale. Samedi 3 août, des milliers de Sud-Coréens ont manifesté dans le centre de leur capitale, scandant des slogans hostiles au gouvernement japonais : « Non à Abe », du nom du premier ministre Shinzo Abe, ou bien encore « Stop aux relations humiliantes nippo-coréennes ». Le même jour, en Thaïlande, le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo, échouait à rapprocher les positions des deux pays lors d’une rencontre avec les ministres des affaires étrangères de Corée du Sud, Kang Kyung-wha, et du Japon, Taro Kono.
La crise s’est envenimée, le 2 août, quand Tokyo a retiré la Corée du Sud de la « liste blanche » des 27 pays bénéficiant de procédures allégées sur le contrôle des exportations. La Corée du Sud est le troisième partenaire commercial du Japon, qui y a exporté 47,2 milliards d’euros de produits en 2018.
Séoul a répliqué en adoptant une mesure similaire. « Il est clair que la responsabilité de la dégradation de la situation incombe au Japon. J’avertis donc le gouvernement nippon qu’il sera responsable de ce qui va arriver », a réagi le président, Moon Jae-in. La Corée du Sud pourrait porter le contentieux devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Boycott de produits nippons
La crise découle de la condamnation, le 30 octobre 2018, par la Cour suprême sud-coréenne de l’industriel japonais Nippon Steel & Sumitomo Metal pour avoir exploité des travailleurs coréens pendant la seconde guerre mondiale. D’autres décisions similaires ont suivi, concernant Mitsubishi Heavy Industries. C’est inadmissible pour Tokyo : selon les Japonais, ces jugements enfreignent l’accord bilatéral de 1965, qui signalait que tous les contentieux liés au passé étaient résolus « complètement et définitivement ». Pour le Japon, qui a occupé la péninsule coréenne de 1910 à 1945, la Corée du Sud a donc commis une « infraction au droit international ». Il a exigé un arbitrage, que Séoul n’a pas accepté.
Le 1er juillet – au lendemain du G20 où il s’est fait le chantre du libre-échange – le gouvernement Abe a choisi de s’attaquer au très sensible terrain économique. Comme le rappelait le 3 août le quotidien japonais de centre gauche Mainichi, la séparation du politique et de l’économique était jusque-là une « un principe fondamental des relations » bilatérales.
Source : Le Monde.fr