Signe d’une certaine fébrilité autour de l’intensification des activités de la Corée du Nord dans le domaine militaire, le Japon a émis jeudi 3 novembre une alerte infondée au sujet d’un missile nord-coréen qui serait passé au-dessus de l’archipel. C’était une erreur : l’engin parti des environs de Pyongyang se serait abîmé en mer du Japon (mer de l’Est), avant d’atteindre l’archipel.
Le système J-Alert, qui transmet des alertes aux séismes ou autres tsunami, et à chaque fois qu’un missile menace d’atteindre le territoire japonais ou de passer au-dessus, a été activé à 8 heures Les habitants des départements de Miyagi, Yamagata et Niigata (Nord-est), présumés sur la route du missile, ont été réveillés en ce jour férié – dédié à la culture – par un message leur indiquant que « le missile serait passé dans l’océan Pacifique vers 7 h 48. Si vous trouvez quelque chose de suspect, ne vous en approchez pas et contactez immédiatement la police ou les pompiers ». L’alerte a aussi été adressée aux habitants de Tokyo. Elle a été levée une dizaine de minutes plus tard.
Le premier ministre, Fumio Kishida, a été prompt à appeler à « assurer la sécurité des avions et des navires » et à « se tenir prêt à toute éventualité ». Il a réuni dans l’urgence son Conseil de sécurité nationale.
Or c’était une fausse alerte. Selon l’armée sud-coréenne, la Corée du Nord a tiré trois missiles. L’un d’eux pourrait être un missile balistique intercontinental (ICBM), ayant donc le potentiel de passer au-dessus du Japon. Il serait parti depuis la zone de Sunan, près de Pyongyang, à 7 h 40. Les deux autres seraient des modèles balistiques à courte portée. Ils auraient décollé de Kaechon dans la province du Pyongan du Sud (ouest du pays) à 8 h 39. Les trois seraient tombés à l’est de la péninsule. D’après les militaires japonais, le présumé ICBM aurait atteint une altitude de 2 000 kilomètres et parcouru 750 km.
Menace d’un septième essai nucléaire
« Le système J-Alert a été activé parce que le missile pouvait survoler l’archipel japonais. Après vérification, il est apparu que le missile ne l’avait pas fait et qu’il était tombé en mer du Japon. Nous poursuivons nos analyses », s’est justifié le ministre japonais de la défense, Yasukazu Hamada, alors que le système J-Alert fait l’objet de critiques sur son fonctionnement. La fausse alerte n’a pas empêché M. Kishida de déplorer les derniers lancements des missiles dont « les tirs continus » représentent « un outrage et sont intolérables ».
Un missile balistique nord-coréen de portée intermédiaire (IRBM) nord-coréen avait survolé le Japon le 4 octobre, pour la première fois depuis 2017. Les tirs du 3 novembre suivaient ceux, effectués la veille, de vingt-trois missiles à courte portée, toujours par Pyongyang. Fait sans précédent depuis la guerre de Corée (1950-1953), l’un de ces missiles serait tombé à moins de 60 km des côtes sud-coréennes, à proximité de la « ligne de limite du Nord » (LLN), qui constitue de facto la frontière maritime entre les deux pays mais dont le tracé reste disputé. Le président sud-coréen, Yoon Seok-youl a dénoncé une « invasion territoriale de fait » et a ordonné une riposte. Des chasseurs du Sud ont tiré trois missiles air-sol.
Ces développements surviennent alors que plane toujours la menace d’un septième essai nucléaire par la Corée du Nord. Les services secrets sud-coréens l’attendent avant le 8 novembre, jour des élections de mi-mandat aux Etats-Unis.
Les tensions devraient perdurer : la Corée du Nord affirme que ses activités répondent aux manœuvres massives effectuées par les Américains, les Coréens du Sud voire les Japonais, qu’elle considère comme une répétition de l’invasion de son territoire. Après les exercices « Ulchi Freedom Shield » de la fin août et ceux, baptisés « Hoguk », de la fin octobre, Américains et Sud-Coréens effectuent jusqu’au 4 novembre les manœuvres « Tempête vigilante », les plus importants jamais organisées par les deux pays, avec 240 avions de combat et plusieurs milliers de soldats mobilisés.
La situation devrait dominer les échanges du ministre sud-coréen de la défense Lee Jong-sup, avec ses interlocuteurs américains lors de la réunion consultative sur la sécurité (SCM) prévue le 3 novembre à Washington, un forum annuel réunissant chaque année Américains et Sud-Coréens.
Source : Le Monde.fr