DécryptagesUn comité de l’ONU estime qu’aucun décès ni cancer n’est, à ce jour, directement imputable aux radiations, dont les effets se feront sentir dans l’environnement pendant des siècles. D’autres experts demandent des études épidémiologiques plus poussées.
Il y a dix ans, un séisme très puissant et le gigantesque tsunami qu’il provoque ravageaient la côte nord-est du Japon, tuant plus de 18 000 personnes. Le site de la centrale de Fukushima Daiichi, l’une des plus grandes au monde, est alors englouti. A la catastrophe naturelle s’ajoute l’un des accidents nucléaires les plus graves de l’histoire – classé au niveau 7, le plus élevé, sur l’échelle internationale des événements nucléaires –, dont les effets sont majeurs.
- Exposition aux radiations : des conséquences difficilement « perceptibles »
Le Comité scientifique des Nations unies pour l’étude des effets des rayonnements ionisants (Unscear) avait dressé un premier bilan de l’impact de l’accident en octobre 2013. Près de huit ans plus tard, après avoir pris en compte les études et travaux publiés au cours des dernières années, ses experts parviennent à la même conclusion : aucun décès ni aucun effet néfaste sur la santé des résidents de la préfecture de Fukushima directement attribuable à l’exposition aux rayonnements n’ont été documentés, et il est peu probable qu’un effet futur sur la santé soit perceptible, écrivent-ils dans un rapport publié mardi 9 mars.
« Il y a toujours un risque de cancer quand des populations sont exposées, même à de faibles doses, mais nous ne pensons pas pouvoir détecter d’augmentation par rapport à l’incidence normale de la maladie dans cette population », explique Gillian Hirth, la présidente de l’Unscear.
L’incidence des cancers de la thyroïde a été particulièrement observée. L’accident de Tchernobyl a en effet permis d’établir de façon claire la corrélation entre l’exposition aux retombées radioactives et le risque de développer ce type de cancer, dû à l’iode 131. Dès 2011, les autorités japonaises ont donc lancé un programme de dépistage systématique des cancers de la thyroïde auprès des 360 000 résidents de la province de Fukushima âgés de moins de 18 ans. Ces campagnes ont révélé un nombre très important de cancers mais, pour les scientifiques, ce résultat serait lié à un « effet du dépistage », conduisant à un surdiagnostic, plutôt qu’à l’exposition aux radiations.
« L’amélioration des techniques permet de repérer des nodules de très petite taille, et donc des cancers qui ne se seraient sans doute en partie jamais déclarés, explique Enora Cléro, épidémiologiste à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Ces campagnes de dépistage ont été menées dans la préfecture de Fukushima mais aussi dans des préfectures n’ayant pas été exposées aux retombées radioactives, et les résultats obtenus sont similaires. » Pour l’IRSN, il est donc « encore prématuré » de se prononcer sur une éventuelle augmentation des cancers de la thyroïde.
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Source : Le Monde.fr