La première visite officielle de Joe Biden en Asie comme président a deux objectifs : montrer l’intensité des relations entre les Etats-Unis et ses alliés dans la région, et la détermination de Washington à contrer les ambitions chinoises, y compris militaires. C’est dans cette perspective que doivent être compris les propos tenus par le président américain, lundi 23 mai à Tokyo.
Arrivé dimanche au Japon après une première étape en Corée du Sud, Joe Biden a été interrogé sur Taïwan au cours d’une conférence de presse en compagnie du premier ministre, Fumio Kishida. Il a exprimé la volonté des Etats-Unis de défendre l’île en cas d’agression chinoise. « C’est l’engagement que nous avons pris », a-t-il dit. « La Chine n’a pas de place pour le compromis ou des concessions » lorsqu’il s’agit de son intégrité territoriale et de sa souveraineté, a réagi le porte-parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin.
Les propos de Joe Biden ne relèvent pas d’une gaffe ou d’un excès de langage, mais plutôt d’une volonté de l’administration d’exprimer plus nettement ses intentions, pour deux raisons. D’une part, les ambitions décomplexées et agressives de la Chine dans l’Indo-Pacifique, derrière les discours de façade sur un monde multipolaire et les vertus de la coopération. De l’autre, les interrogations sur les capacités des Etats-Unis à traiter plusieurs crises simultanées, au vu de leur investissement politique et militaire en soutien de l’Ukraine, contre la Russie. Sur ce point, Joe Biden a d’ailleurs établi un lien entre les crises, en soulignant la nécessité de sanctions longues et fermes contre la Russie. Dans le cas contraire, a-t-il dit, « quel signal cela enverrait-il à la Chine sur le coût d’une tentative de prise de Taïwan par la force ? »
« Action similaire » à l’Ukraine
Toutefois, un conseiller de la Maison Blanche a dû rapidement préciser les propos du président, en assurant qu’il ne s’agissait pas là d’un abandon de l’ambiguïté stratégique, pratiquée par les Etats-Unis dans ce dossier. Washington continue donc à placer ses livraisons d’armements à l’île dans le cadre du Taiwan Relations Act de 1979. Une chorégraphie identique avait eu lieu en octobre 2021, lorsque Joe Biden avait participé à une émission en public diffusée sur la chaîne CNN. Il avait aussi évoqué « l’engagement » à défendre Taïwan en cas d’agression chinoise. La porte-parole de la Maison Blanche, Jen Psaki, avait ensuite assuré que la politique américaine demeurait inchangée.
Joe Biden lui-même a réitéré, sur le fond, la ligne traditionnelle des Etats-Unis, consistant à accepter l’idée d’une Chine unique. Mais l’idée d’une prise de Taïwan par la force « ne serait simplement pas appropriée, a précisé le président. Cela conduirait à la dislocation de la région entière et serait une action similaire à ce qui s’est passé en Ukraine. Il s’agit donc d’une charge encore plus lourde. » Joe Biden a estimé que la Chine « flirtait déjà avec le danger », avec des manœuvres militaires à proximité de l’île, qu’elle considère comme une simple province indisciplinée.
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Source : Le Monde.fr