La Marche des fiertés a cette année été éclipsée par l’avènement du nouvel empereur, mais le Japon connaît des avancées significatives en matière de droits pour les LGBT.
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LETTRE DE TOKYO
Les cérémonies de l’abdication de l’empereur Akihito et de l’avènement de son fils, Naruhito, ont quelque peu éclipsé la 25e Marche des fiertés qui s’est déroulée pratiquement aux mêmes dates, les 28 et 29 avril. Au cours des dix dernières années, le nombre des participants n’a cessé d’augmenter : plus de 10 000 personnes y ont pris part et près de 200 000 se sont rendues au festival qui a suivi. Le mouvement LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres) a permis des avancées significatives en matière de reconnaissance de la diversité des genres mais le chemin sera long.
Stimulées par la préparation des Jeux olympiques de 2020 qui attireront les regards du reste du monde sur le Japon, des entreprises – à commencer par les sponsors officiels des JO – affichent leur soutien au mouvement LGBT et revendiquent pratiquer une gestion non discriminatoire. Depuis 2015, en outre, une dizaine de municipalités délivrent des certificats de partenariat domestique aux couples gays : ce document facilite les démarches administratives, la passation de contrat d’assurance ou des prêts conjoints. Le mariage pour tous, en revanche, n’est pas légalement reconnu au Japon.
Discrimination rampante
Selon une enquête de l’agence de publicité Dentsu, environ 8 % de la population se considère faisant partie des communautés LGBT, soit 10 millions de personnes sur une population de 126 millions. Mais les coming out restent rares. La crainte de discrimination est forte. « Je ne me résous pas à révéler que je suis gay en raison des moqueries de mes collègues lorsqu’ils parlent des homosexuels » confie l’employé d’une entreprise qui se dit pourtant « friendly LGBT ». « Dissimuler est plus simple. »
Cette discrimination rampante peut avoir des conséquences tragiques pour ceux qui se sont ouverts à des proches ou à des collègues sous le sceau du secret, que ces derniers n’ont pas respecté. Découverts, certains quittent leur université ou leur entreprise. Leur détresse psychique peut parfois les conduire au suicide : ce fut le cas d’un étudiant de l’université Hitotsubashi à Tokyo en 2015.
Selon Shinya Maezono, un avocat qui a créé un site Internet de conseil aux communautés LGBT, « la société japonaise refuse de reconnaître la diversité de genre ». Ce ne fut pas toujours le cas. Avant l’ouverture du Japon à l’étranger et sa modernisation au cours de la seconde partie du XIXe siècle, le Japon a connu une sexualité non inhibée par une quelconque mauvaise conscience religieuse ou contrainte par la distinction du corps et de l’esprit.
Source : Le Monde.fr