ReportagePour rajeunir son image, la Cité internationale de la tapisserie travaille sur cinq pièces monumentales tirées des films d’animation du réalisateur japonais.
Un coussin sur le ventre, l’arrière des cuisses calé par une barre en bois, Patrick Guillot se penche sur l’immense métier à tisser situé au 2e étage de la Cité internationale de la tapisserie d’Aubusson (Creuse). Long de 8 mètres, l’établi est l’un des plus grands de France. D’un coup de pédale, le lissier écarte les fils de chaîne et glisse une bobine sous les fibres de coton, plusieurs fois, d’un geste vif. « Là, j’utilise un mélange de lin et de rayonne, pour donner une impression d’humidité sur un rocher », indique l’artisan. Difficile pour le moment de distinguer ce à quoi ressemblera la tapisserie : vu sa taille – 23 mètres carrés –, la tombée de métier n’est pas prévue avant un an !
Seule certitude, le résultat sera inédit. Pour moderniser son image, la Cité internationale d’Aubusson a décidé de réaliser cinq tapisseries monumentales tirées des films d’animation du réalisateur Hayao Miyazaki, une première pour le Walt Disney japonais. Celle dont le tissage vient de débuter représentera deux des personnages de Princesse Mononoké (1997), Ashitaka et son cerf-bouquetin Yakul, qui s’abreuvent dans le clair-obscur d’une forêt.
Un défi pour les lissiers de l’atelier aubussonnais Guillot, à qui la réalisation de la tapisserie a été confiée, tant les effets de lumière et de matière sont nombreux. « On va faire ce qu’on appelle de la multiple contexture, utiliser des fils différents pour donner du relief, comme de la laine bouclette pour la mousse », détaille M. Guillot.
Pour donner vie à cette image, 105 nuances de couleur ont été créées par Delphine Mangeret, l’artiste qui a réalisé le « carton » de la tapisserie, sorte de réplique en papier où sont consignés les motifs et les couleurs de l’œuvre. Un métier qui demande sens artistique et maîtrise technique (le plasticien Victor Vasarely fut « cartonnier » à Aubusson).
Commande exceptionnelle
Dessiné aux dimensions réelles de la tapisserie, ce « carton » est enroulé au préalable sur le métier à tisser et sert de patron aux lissiers. « Mais la marge d’interprétation est importante, beaucoup de choses se décident au fur et à mesure », assure Delphine Mangeret, qui vient quotidiennement superviser le travail des lissiers. « Nous sommes comme des musiciens qui interprètent une partition », confirme Patrick Guillot. Lui-même s’est plongé dans les films de Hayao Miyazaki avant de commencer son travail, « pour s’imprégner de l’atmosphère, bien cerner les couleurs ».
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Source : Le Monde.fr
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