Le créateur Kansai Yamamoto est mort d’une leucémie, lundi 27 juillet à l’âge de 76 ans, a annoncé sa fille. Pionnier de la mode au Japon et connu pour ses collaborations avec David Bowie, « il a quitté ce monde en paix, entouré de ceux qu’il aimait, a déclaré sa fille, l’actrice Mirai Yamamoto sur Instagram. A mes yeux, mon père n’était pas seulement la personne énergique et électrique que le monde connaissait, mais aussi un être attentionné, bienveillant et plein d’affection. »
Kansai Yamamoto était connu pour ses créations audacieuses qui défiaient les normes de genre et faisaient appel à d’éclatantes couleurs ainsi qu’à des motifs avant-gardistes. Il a accédé à la notoriété avec des défilés internationaux à partir des années 1970 et a été acclamé par le grand public pour son travail avec David Bowie, imaginant notamment une série de tenues pour Ziggy Stardust, l’alter ego du chanteur. « J’ai trouvé que l’esthétique de David et son ardeur à vouloir transcender les frontières du genre étaient terriblement belles », avait-il déclaré au site The Cut en 2018.
Ses œuvres ont aussi attiré l’attention et la reconnaissance d’autres légendes de la scène, comme Elton John ou Stevie Wonder, et son expérience de la création de costumes l’a mené à imaginer des performances vivantes en interaction avec les spectateurs. Ses spectacles nommés « Super Show » ont été organisés dans le monde entier, l’édition « Hello !! Russia », en 1993, attirant 120 000 spectateurs sur la place Rouge à Moscou.
Style graphique accrocheur
Les créations de Kansai Yamamoto faisaient souvent appel à des éléments de la culture japonaise, comme les capes recouvertes de caractères sino-japonais (kanji) qu’il a dessinées pour David Bowie ou le théâtre kabuki (forme épique du théâtre japonais traditionnel), auquel il s’était attaqué à l’occasion d’une collaboration avec Louis Vuitton.
Son style graphique accrocheur, avec des couleurs saturées et des motifs saisissants, lui donnait une place à part parmi les icônes plus minimalistes de la mode japonaise. « Une personne comme moi se démarque forcément au Japon », disait-il en 2017 dans une interview au quotidien Nikkei.
Mais Kansai Yamamoto insistait sur le fait que son œuvre puisait dans une sensibilité différente, mais non moins japonaise : celle de l’esthétique audacieuse et non conventionnelle des seigneurs de guerre du Moyen Age nippon. « Il y a peu de successeurs pour cette culture, mais je pense qu’elle me sied mieux », disait-il.
Une enfance difficile
Les vêtements exubérants et la personnalité enjouée de Kansai Yamamoto contrastaient avec, disait-il, une facette sombre héritée d’une enfance difficile. Après le divorce de ses parents quand il avait 7 ans, il avait été envoyé dans un foyer pour enfants, à quelques centaines de kilomètres de sa famille. Il avait dû voyager avec ses deux frères cadets, âgés de 3 et 5 ans, de Yokohama, près de Tokyo, pour la lointaine région de Kochi (sud-ouest).
Alors que le succès a été immédiat lors de la première présentation de ses créations à Londres, en 1971, il dut travailler dur pour surmonter la réception initialement plus froide à Paris. La clé était, selon sa formule, de « garder l’esprit du défi ».
Il a toujours vécu selon ce mantra, déclarant en 2018 son intention de voyager jusqu’au pôle Nord, un rêve auquel il a finalement dû renoncer quand on lui a diagnostiqué une leucémie. « Aucune vie n’est pleine de bonnes choses », avait-il déclaré en 2017. « J’ai connu beaucoup de moments difficiles, avait-il affirmé. Mais quand on traverse des épreuves, la joie ressentie en les surmontant est aussi très grande. »
Source : Le Monde.fr