La priorité redonnée au nucléaire par le Japon peine à convaincre dans un pays encore traumatisé par la catastrophe de Fukushima en 2011. « Comment pouvez-vous oublier Fukushima ? », regrettait le 22 juillet Hiromi Ishii, qui avait dû quitter sa maison après la destruction de la centrale nucléaire, lors d’une manifestation contre le retour en force de l’atome dans la stratégie énergétique de l’archipel.
Le 22 décembre, Mme Ishiii a participé à un nouveau rassemblement devant les bureaux du premier ministre, Fumio Kishida, contre sa décision de valider les nouvelles orientations pour le nucléaire proposées par la commission exécutive chargée de la transition verte, baptisée GX. Mise en place en juillet pour réfléchir aux moyens de réaliser les objectifs de réduction des émissions de 46 % d’ici 2030 (par rapport aux niveaux de 2013) et de neutralité carbone à l’horizon 2050, la GX considère le nucléaire comme « une source d’énergie qui contribue à la sécurité énergétique et qui est efficace pour la décarbonation ».
La commission plaide pour optimiser l’utilisation des réacteurs en en redémarrant le plus possible. Avant la catastrophe de Fukushima, cinquante-quatre réacteurs généraient 30 % de l’électricité du Japon. Tous ont été arrêtés après le drame, et de nouvelles normes de sécurité ont été établies. Aujourd’hui, dix des trente-neuf réacteurs ont obtenu l’autorisation de redémarrer et sont en service. Dix-sept autres sont en attente d’une autorisation de redémarrage. Certains ayant passé les inspections de sécurité ne peuvent être relancés en raison d’oppositions des populations locales.
A l’exercice 2021 clos fin mars, l’énergie nucléaire n’a fourni que 6,9 % de l’électricité du pays, alors que le gouvernement ambitionne une part de 20 % à 22 % pour le nucléaire dans le bouquet électrique à l’horizon 2030. Les énergies renouvelables en ont généré 20,3 % et cette part devrait passer à 36 % en 2030.
Dépendant des énergies fossiles
L’autre préconisation de la GX est de prolonger la durée de vie des réacteurs les plus anciens. Après Fukushima, le gouvernement avait limité leur utilisation à quarante ans, avec une éventuelle prolongation de vingt ans. Désormais les exploitants pourront postuler pour des prolongations de dix ans des réacteurs de 30 ans ou plus. Les périodes passées hors ligne ne devraient plus être comptabilisées pour calculer leur vieillissement.
Enfin, la nouvelle politique prévoit la construction de « réacteurs innovants de nouvelle génération » pour remplacer la vingtaine de tranches devant être démantelées. En octobre, Mitsubishi Heavy Industries (MHI) a détaillé la conception du réacteur à eau pressurisée SRZ-1200. Son rival, Hitachi GE Nuclear Energy, travaille sur un modèle similaire. Les deux groupes s’intéressent aussi aux petites unités modulaires d’une puissance maximum de 300 mégawatts, ainsi qu’aux réacteurs nucléaires à très haute température, VHTR, et aux réacteurs à neutrons rapides.
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Source : Le Monde.fr