Le Japon a promis « une étroite collaboration » avec l’Afrique, afin d’y promouvoir une économie « plus résiliente » face aux crises et aux épidémies et davantage de « sécurité » sur un continent miné par les guerres et le terrorisme, lors de la huitième Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (Ticad 8) qui s’est déroulé les 27 et 28 août, à Tunis.
Le premier ministre japonais Fumio Kishida a jugé indispensable de « remédier à une injustice historique » pour que l’Afrique obtienne un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU et le Japon, a-t-il déclaré, poussera dans cette direction quand il y sera un membre non permanent en 2023-2024. Le Japon entend « créer un environnement où le peuple africain pourra vivre en paix et en sécurité afin de pouvoir se développer », a expliqué M. Kishida, en visioconférence depuis Tokyo, parce que positif au Covid-19.
Cette thématique a été longuement développée par le président sénégalais et président en exercice de l’Union africaine (UA) Macky Sall, réclamant que « les mentalités changent ». « Ce qui nous déstabilise et nous empêche de nous développer doit être pris en compte par le Conseil de sécurité dont c’est la mission, a ajouté M. Sall. L’Afrique est le ventre mou du terrorisme international. Il faut une réponse globale. »
« Paix et sécurité »
Soulignant devant la presse que certains pays d’Afrique de l’Ouest « consacrent 30 % de leur budget à la lutte contre le terrorisme », M. Sall a plaidé pour que « ces nouvelles charges » des armées africaines « soient sorties du calcul du déficit ». Il a appelé en outre les bailleurs de fonds à contribuer au Fonds de l’UA pour la paix.
Près de vingt chefs d’Etat et de gouvernement africains ont assisté à Tunis à la huitième Conférence Ticad (Tokyo International Conference for African Development) qui a rassemblé samedi et dimanche 5 000 participants conviés aussi à un forum d’entrepreneurs et à des conférences parallèles.
Le Japon, qui a annoncé samedi l’octroi de 30 milliards de dollars (30 milliards d’euros) à de fonds privés et publics à l’Afrique sur trois ans, a prévu un volet « paix et sécurité » pour la formation de policiers, l’aide à l’organisation d’élections, le contrôle des frontières.
Une aide concrète de 8,3 millions de dollars sera notamment allouée à la région sahélienne du Liptako-Gourma, à cheval sur le Mali, le Burkina-Faso et le Niger, dévastée par des attaques djihadistes.
Le Japon a aussi décidé de nommer un ambassadeur pour la Corne de l’Afrique, où « la situation se dégrade », a noté M. Kishida, avec un afflux de réfugiés et des pénuries alimentaires. « Le continent africain continue de souffrir, on y a vu des actes répétés de violences. Tristement en Libye, la situation s’est enflammée de nouveau hier », a abondé devant les médias le président tunisien Kaïs Saïed, hôte du sommet.
Comme Macky Sall, M. Saïed a réclamé « une nouvelle approche » internationale pour l’aide au développement à l’Afrique, pour les pays très endettés, comme la Tunisie, et à transformer « les dettes en investissements ».
« Accompagner la relance »
Il a regretté l’émigration des ressources humaines du Sud vers le Nord, après un « pillage » des ressources des pays africains, « de l’extérieur et de l’intérieur du fait souvent de leurs propres dirigeants ».
M. Sall a évoqué « un rééchelonnement ou effacement des dettes » et réitéré la demande africaine d’une « réallocation de droits de tirage spéciaux » du Fonds monétaire international (FMI), et « la mise en œuvre de la suspension du service de la dette » (remboursement des intérêts) promise par le G20, groupement des vingt premières économies mondiales. « Face à la double crise que nous traversons », sous l’effet du Covid et de la guerre en Ukraine, il a jugé ces mesures nécessaires « pour accompagner la relance de nos économies ».
La Déclaration de Tunis, adoptée dimanche, a exprimé une « profonde inquiétude » face à l’impact de la guerre en Ukraine qui a « créé une insécurité alimentaire en Afrique ». Les dirigeants y appellent à « une reprise des exportations de céréales, produits agricoles et engrais » vers l’Afrique.
La Déclaration reprend les trois grands axes de coopération du Japon avec l’Afrique : une accélération de la croissance avec des investissements dans l’économie verte et les start-up ; une « économie résiliente » avec un soutien à la production de médicaments et de vaccins ainsi que le renforcement de la sécurité alimentaire ; et « la paix et la sécurité » en soutenant les médiations et la prévention des conflits.
Source : Le Monde.fr