La priorité affichée par le président conservateur sud-coréen, Yoon Seok-youl, de rapprocher son pays du Japon et, au-delà, des autres démocraties libérales, ne va pas sans heurts. Ce faisant, M. Yoon mécontente le voisin chinois et s’aliène une partie de l’opinion sud-coréenne.
Profitant de l’anniversaire, mercredi 1er mars, du mouvement d’indépendance de 1919 contre la colonisation nippone (1910-1945), M. Yoon a présenté le Japon comme étant « passé du rang d’agresseur militariste à celui de partenaire qui partage les mêmes valeurs universelles que nous ».
Un positionnement apprécié dans l’Archipel, où le secrétaire général du gouvernement, Hirokazu Matsuno, a parlé de la Corée du Sud comme d’« un voisin important » avec lequel Tokyo devait collaborer pour relever les défis au niveau international. « La coopération bilatérale avec nos alliés est importante, mais la coopération trilatérale l’est tout autant. Nous soutenons vivement cette vision du président Yoon d’une relation plus coopérative et tournée vers l’avenir avec le Japon », a renchéri Ned Price, porte-parole du département d’Etat américain. Washington pousse au rapprochement entre Séoul et Tokyo face aux menaces nord-coréennes mais aussi chinoises.
« Etat de somnambulisme »
Ces réactions contrastent avec la défiance de Pékin, traduite dans Global Times, la voix du pouvoir chinois, par la description d’une administration Yoon « hypnotisée par une berceuse américaine » et « entrée en état de somnambulisme dans ses initiatives diplomatiques ».
Le rapprochement avec le Japon sert la politique de M. Yoon, qui, dès son arrivée au pouvoir en mai 2022, a exprimé sa volonté de faire de la Corée du Sud un acteur des relations internationales aux côtés des démocraties libérales contre les régimes autoritaires. Ce choix rompait avec les positionnements passés, visant l’équilibre entre l’allié américain et le voisin chinois, premier partenaire commercial de Séoul.
Ce tournant diplomatique est justifié par la menace nord-coréenne mais aussi par les tensions avec la Chine, qui avait vivement réagi au déploiement, en 2016 en Corée du Sud, de systèmes de défense antimissile américains THAAD, considérés à Pékin comme un prétexte pour les Américains pour espionner la Chine. Il s’inscrit aussi dans la bipolarisation observée au niveau mondial, accélérée par la guerre en Ukraine.
« Définir un avenir commun »
Pour se rapprocher de Tokyo, M. Yoon a rompu avec ce qu’il a qualifié d’« instrumentalisation » des contentieux historiques à des fins politiques par son prédécesseur, le progressiste Moon Jae-in (2017-2022). Ce dernier avait choisi de glorifier le mouvement de résistance de 1919 et de soutenir les revendications mémorielles, en l’occurrence les questions des femmes dites « de réconfort », un euphémisme pour parler des femmes exploitées sexuellement par les militaires nippons pendant la seconde guerre mondiale, mais aussi du travail forcé de Coréens pour des entreprises japonaises. La politique de M. Moon avait durablement fragilisé les liens avec un Japon rétif à toute repentance.
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Source : Le Monde.fr
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