Le rejet, mardi 21 décembre, sous pression des milieux nationalistes, de la proposition de la ville de Musashino (Kanto) d’accorder le droit de vote aux étrangers, pour les référendums locaux, traduit une défiance persistante du Japon vis-à-vis des ressortissants venus d’ailleurs, exacerbée depuis le début de la pandémie de Covid-19. « Certains ont considéré que la proposition n’avait pas convaincu les citoyens », a dit, dans un euphémisme, Reiko Matsushita, la maire de Musashino, après l’échec de son projet, soutenu par les formations progressistes, démocrate et communiste.
Selon le texte, présenté le 12 novembre, les référendums devaient être ouverts aux étrangers de plus de 18 ans résidant depuis plus de trois mois dans la commune de 150 000 habitants de l’ouest de Tokyo, connue pour son quartier animé de Kichijoji. Mme Matsushita souhaitait ainsi « réaliser une société multiculturelle » et ne voyait « aucune raison d’exclure les étrangers » de ces consultations, dont le résultat n’entraîne aucune obligation légale. Elle avait précisé que son projet ne donnait en aucun cas le droit de vote aux étrangers pour les élections. Un tel système est déjà en place à Zushi, au sud de Tokyo, et à Toyonaka, dans l’ouest du pays.
Débat ancien, mais rares progrès
Dès l’annonce de Mme Matsushita, les oppositions se sont mobilisées. Des groupuscules xénophobes, à commencer par le parti Le Japon d’abord, du militant Makoto Sakurai – connu pour ses discours haineux envers la minorité coréenne du Japon –, ont organisé des rassemblements dans le centre de Musashino. Les soixante-dix parlementaires du Parti libéral démocrate (PLD au pouvoir), membres de l’Association de protection de la dignité et des intérêts nationaux du Japon, ont qualifié le projet de menace pour la sécurité nationale. Masahisa Sato, membre du PLD, a déclaré sur Twitter : « C’est la porte ouverte à l’entrisme de la Chine. » Il a aussi souligné que les étrangers pourraient finir par acquérir le droit de vote aux élections et « contrôler l’administration et le Parlement ».
« Que se passerait-il si de tels projets étaient adoptés dans des municipalités abritant des bases militaires américaines ou des Forces d’autodéfense [FAD, l’armée japonaise], des centrales nucléaires ou des îles au cœur de contentieux territoriaux ? », a questionné Hidetsugu Yagi, spécialiste du droit constitutionnel à l’université Reitaku, dans le très conservateur quotidien Sankei.
Les débats sur le droit de vote des étrangers ne sont pas nouveaux au Japon, mais les progrès sont rares. En 1984, une révision de la loi sur la nationalité a donné ce droit aux enfants nés d’un couple dont un parent est japonais. Et, depuis le début des années 1990, une quarantaine de municipalités autorisent les résidents permanents à s’exprimer lors des référendums locaux.
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Source : Le Monde.fr
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