Tribune. Yoshihide Suga rencontre, vendredi 16 avril, le président Biden. Signe d’un intérêt particulier, le premier ministre japonais est le premier chef d’Etat ou de gouvernement à se rendre aux Etats-Unis pour rencontrer son homologue. Il marche ainsi dans les pas de son prédécesseur Shinzo Abe qui [en 2016] avait été le premier à obtenir un entretien avec Donald Trump à peine élu.
Pour le Japon, cette réaffirmation de la prééminence de l’alliance nippo-américaine par les Etats-Unis, et plus globalement de l’espace indo-pacifique, est essentielle. L’annonce par Washington du retrait d’Afghanistan souligne un peu plus cette orientation de la priorité stratégique vers le Pacifique, inaugurée sous Obama par ceux qui entourent aujourd’hui le président Biden, et poursuivie par Donald Trump.
Autre point positif pour Tokyo, les Etats-Unis ont répété à plusieurs reprises que l’archipel des Senkaku, où la Chine augmente sa pression, était bien couvert par l’article 5 du traité de coopération mutuelle et de sécurité en vigueur depuis 1960. En effet, si la mer de Chine du Sud est un terrain très visible de la stratégie du fait accompli menée par Pékin, les îles Senkaku, japonaises depuis 1895, sont aussi une zone de test : en cas de pression trop forte ou de tentative de débarquement de la part d’un régime chinois qui veut s’affirmer, que ferait Tokyo ?
La meilleure des dissuasions
Le Japon est tenu par les fortes contraintes de sa Constitution – et de son opinion publique – et mal à l’aise dans la gestion de crise dans les « zones grises » que la Chine affectionne pour leur ambiguïté. Dans ce contexte, la réaffirmation forte de l’alliance et de l’engagement américain constitue la meilleure des dissuasions : le moindre doute, interprété par Pékin comme un signe de faiblesse, ne pourrait mener qu’à une crise grave.
Le Japon, depuis de nombreuses années, s’est doté d’un arsenal législatif et réglementaire qui autorise en principe les forces de l’Archipel à soutenir les Etats-Unis en cas de crise constituant une menace vitale
Mais les Senkaku ne sont pas tout, et si, comme l’argumente avec raison Tokyo, l’importance de l’alliance, et sa pertinence, résident aussi dans son rôle de pierre angulaire de la stabilité en Asie, les Etats-Unis continuent d’attendre du Japon une implication plus importante.
Pour Donald Trump, comme avec l’Allemagne, il s’agissait de « faire payer le Japon », qui participe déjà massivement à l’entretien des bases américaines sur son sol. Avec Joe Biden, les enjeux sont plus complexes. La question du financement des bases a été repoussée, ce qui apaise les tensions. Mais Washington attend aussi des engagements qui aillent au-delà des déclarations de principe sur les « valeurs communes ».
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Source : Le Monde.fr
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